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Accueil » Acteurs et configurations de la relation de service en transition
Dès le deuxième numéro de la Revue française de gestion, un article de Pierre Eiglier et Éric Langeard (1975) pointait l’importance de renouveler notre compréhension des services un objet qui n’a cessé de stimuler la réflexion en sciences de gestion. La relation de service qui se noue à l’occasion d’une prestation de service entre son utilisateur et l’agent à son contact occupe une place centrale et transversale dans cette réflexion. En témoigne, par exemple, le numéro spécial de la Revue française de gestion consacré à la participation des clients (Rouquet et al., 2013), qui interrogeait le rôle et la place de ces derniers dans les organisations. Pourtant, depuis presque dix ans, l’intérêt académique semble s’être estompé, alors même que les services connaissent une mutation radicale. L’actualité nous rappelle ainsi que les services sont aujourd’hui en prise avec les incidences multiples des crises que traverse notre société. L’actualité nous en fournit de nombreux exemples à l’instar des épisodes de violence au guichet, comme lors du drame de la mort d’un employé d’une boutique Bouygues Télécom survenue le 10 juillet 2021. Les services pâtissent aussi des crises sanitaires (le Covid–19 et ses gestes barrières) et sociales (la fameuse « grande démission », affectant tout particulièrement les emplois au contact du destinataire du service comme dans la santé ou la restauration). Nous pensons que ces crises doivent être considérées comme des révélateurs d’une transition vers de nouveaux modèles d’organisation et de nouvelles configurations de la relation de service. Les évolutions de l’environnement économique et sociétal ont ainsi des conséquences directes sur les emplois de service et l’accès aux services et redéfinissent les contours de la relation de service en termes de rôles, d’identités, de pouvoir, etc.
La technologie est un facteur clé évident de ces transformations, à mettre en relation avec l’émergence de nouveaux modèles économiques (par exemple l’économie des plateformes et l’une de ses conséquences, « l’ubérisation des services »). On assiste en
effet, de façon concomitante au développement de l’économie des plateformes, à l’émergence de nouveaux rôles attribués aux parties prenantes de la relation de service. Les clients–bénéficiaires–usagers sont de plus en plus sollicités, et endossent des rôles
variés les conduisant à « se professionnaliser » (Juge et al., 2019 ; Kozinets et al., 2019) : apporteurs de capital productif, investisseurs, fournisseurs de données, offreurs de service, évaluateurs et opérateurs. En miroir, les personnels en contact sont sommés de devenir des « welcomers », des « goodbuyers » (Leroy Merlin), des « co–équipiers » (Décathlon), des « designers d’expériences » (Club Med), des « guides conseils » (Nature et Découvertes), tout en étant au service de la performance commerciale. Le numérique et les technologies au cœur de cette économie questionnent ainsi le devenir des métiers de service (Bowen, 2016), tout en favorisant l’émergence de nouveaux rôles problématiques, comme les clickworkers (Casilli, 2019).
Les nouveaux rôles auxquels sont enjoints les bénéficiaires interpellent en creux sur la capacité des organisations de service à tenir compte de la vulnérabilité croissante de certains des destinataires qui ne peuvent endosser ces rôles actifs (par exemple dans le
secteur de la santé, cf. Bonnemaizon et al., 2020 ou Collard, 2021). Dans le cas des services publics, face à la dématérialisation des démarches administratives, la prise en charge des personnes faiblement équipées sur le plan numérique (en particulier celles en
situation de handicap visuel, moteur, cognitif, qui n’ont accès qu’à 40% des services en ligne selon une estimation en 20221) constitue un enjeu démocratique important que révèle notamment la problématique de non–recours aux droits et prestations sociales (Warin, 2019). De façon plus générale, ces situations de vulnérabilité soulèvent la question des compétences des destinataires du service, autrement dit de leur capacité à endosser ces nouveaux rôles – appelant à une réflexion sur l’équipement et l’accompagnement des utilisateurs et ce dès la phase de conception des nouveaux services. Du côté des agents, outre la nécessaire appropriation de nouvelles méthodes de travail et d’outils digitaux, cette dématérialisation des services publics pose la question de la perte de sens liée à l’altération du contact direct avec les usagers. Ces nouveaux rôles ne sont par ailleurs pas sans effets sur les rapports de pouvoir entre les parties prenantes de la relation de service : « asymétries d’attention » et manque de reconnaissance du travail des agents en contact (par référence à la notion de « symétrie des attentions » développée par l’Académie du Service2), ou déséquilibres d’expertise perçus (bénéficiaires se jugeant aussi compétents que les agents en contact, dès lors qu’ils ont fait quelques recherches sur Internet notamment…). Les destins des producteurs et des destinataires du service doivent ainsi être pensés en
dialogue l’un avec l’autre, y compris lorsqu’il est question pour eux d’exprimer leur résistance (Martel et Roux, 2020) ou d’établir une limite à des comportements jugés déviants (Suquet, 2010). Nous souhaitons ainsi que ce dossier spécial soit l’occasion de
rendre compte de l’émergence de ces nouveaux rôles, acteurs, et configurations des relations de service, dans une approche pragmatique – c’est–à–dire en partant des actions et difficultés concrètes des acteurs de la relation et en analysant ce qui s’y joue (Schneider et al., 2021). Nous appelons à des contributions qui permettent de décrire et distinguer ces configurations selon différentes dimensions grandement liées, notamment celle des crises (ex : contribution qui discute de la crise sanitaire et de ses effets sur certaines relations dans le service public), celle des rapports de pouvoir/rapports de force, celle des modèles d’affaires à l’ère des plateformes, celle des nouveaux métiers et compétences/connaissances associées, celle des effets sur les destinataires du service et les agents en contact.
En particulier, nous attendons des propositions issues de l’ensemble des sous–disciplines des sciences de gestion, et invitons à des regards croisés et interdisciplinaires à même d’embrasser trois thématiques participant du thème central de ce dossier sur les
(re)configurations de la relation de service. Chacune de ces thématiques se déclinent en une série de questions (liste non exhaustive).
1. Les transformations concomitantes des rôles du personnel en contact et des bénéficiaires du service
2. Les nouvelles relations de service au défi des compétences de leurs parties prenantes
3. Le pilotage et la création de valeur des nouvelles relations de service
Dans un contexte de crise, il nous semble enfin essentiel de s’interroger sur la/notre capacité à rendre compte de ce qui se passe et se joue sur le terrain. Pour cette raison, nous attachons un intérêt particulier à la réflexion critique des chercheurs sur la
méthodologie utilisée et sur les méthodologies existantes. Il nous semble en effet nécessaire de nous interroger quant au fait de savoir si les méthodologies habituelles sont aujourd’hui pertinentes pour rendre compte des nouvelles configurations de la relation de service et si d’autres cadres théoriques permettraient d’apporter un autre regard et une analyse plus fine sur ces questions.
Bibliographie
Bonnemaizon A., Abdelmajid A. et Josion–Portail M. (2020). « La participation des patients âgés à la relation de soins en question(s) ! Une recherche dans un service hospitalier de gériatrie », Revue française de gestion, vol. 46, n° 290, 107–127. Bowen D.E. (2016). “The changing role of employees in service theory and practice: An interdisciplinary view”, Human Resource Management Review, vol. 26, n° 1, 4–13. Casilli A. (2019).En attendant les robots : Enquête sur le travail du clic, Paris, Éditions du
Seuil. Collard D. (2021). Gériatrie : carrefour des souffrances, Paris, Éditions L’Harmattan. Eiglier P. et Langeard E. (1975). « Une approche nouvelle du marketing des services »,Revue française de gestion, vol. 1, n°2, 97–115. Juge E., Collin–Lachaud I. et Roux D. (2019). « Extension du domaine de l’entrepreneurialité dans la pratique du vide–dressing », Revue française de gestion, vol.45, n° 284, 31–49. Kozinets R., Ferreira D.A. et Chimenti P. (2019). “How do platforms empower consumers? Insights from the affordances and constraints of Reclame Aqui”, Journal of Consumer Research, vol. 48, n° 3, 428–455. Martel E. et Roux D. (2020), « Pour, contre et avec le client : Une approche théorique de la résistance du personnel en contact », Revue française de gestion, vol. 46, n° 292, 97–119. Rouquet A., Reniou F.et Goudarzi K. (2013). « Le client « acteur » de l’organisation. Enjeux et perspectives pour les sciences de gestion ». Revue française de gestion, vol. 39, n° 234, 85–98. Schneider A., Subramanian D., Suquet J.–B. et Ughetto P. (2022). “Situating service work in action: A review and a pragmatist agenda for analysing interactive service work”, International Journal of Management Reviews, vol. 24, n° 1, 25–50. Suquet J.–B. (2010). “Drawing the line: how inspectors enact deviant behaviors”, Journal of Services Marketing, vol. 24, n° 6, 468–675. Warin P. (dir.) (2019), Agir contre le non–recours aux droits sociaux. Scènes et enjeux politiques, Fontaine, Presses Universitaires de Grenoble.
Les articles doivent être déposés avant le 5 février 2024 sur le site internet de la RFG https://rfg.revuesonline.com/ (« soumettre votre article en ligne ») en mentionnant dans la lettre d’accompagnement le titre du dossier : « Acteurs et configurations de la relation de service en transition ». Ils devront strictement respecter les consignes de la RFG disponibles sur : https://rfg.revuesonline.com/pour–les–auteurs/instructions–aux–auteurs
Tous les manuscrits retenus dans le cadre de cet appel à contributions feront l’objet d’une évaluation en double aveugle suivant les standards de la Revue française de gestion.